Histoire
La popularité, quel pire ennemi? Bien qu’apportant son lot de reconnaissance, de célébrité et de gloire, je donnerais tout pour m’en départir. Tout. C’est un cercle vicieux dont on ne peut plus se défaire une fois piégé…
L’été de mes 7ans, a été un tournant dans ma vie, marqué par un déménagement important. Je quittais ces paysages austères que j’aimais tant, ceux qui caractérisaient mon Écosse natal, pour le nouveau continent; l’Amérique. Idée insensée de la part de mes parents, décision prise sur un coup de tête? Quoi qu’il en soit, c’est ainsi que j’atterris dans la tristement grande ville de Toronto. Le temps paisible de mon enfance était révolu. Mes parents, bien décidé a tromper l’ennui qui me gagnait un peu plus jour après jour, m’inscrire a tout un tas d’activités, me faisant découvrir par le fait même, le hockey.
Je démontrai immédiatement un fort potentiel, les longues heures passées a courir a travers les collines escarpées depuis mon plus jeune âge, avaient déjà endurci mon tout petit corps. Et j’avais la piqûre du hockey. Tout mes moments libres, je les passais sur la glace a améliorer mon coup de patin, et ma précision.
A 11 ans, mon avenir était déjà tracé; le retard de plusieurs années que j’avais autrefois eu face a mes coéquipiers avait laissé place a un avantage sur eux, j’étais parvenu non seulement a les égaler, mais aussi a les dépasser. Ce qui, selon mes coachs, laissait voir une grande détermination, un immense talent ainsi que la possibilité de s’élever avec les années, toujours plus hauts dans cette voix.
Sous leurs encouragements, j’ai redoublé d’effort, mettant mes études de coté, sans pour autant les abandonnées. J’ai multiplié les séances de conditionnement physique pour augmenter ma résistance ainsi que ma puissance; mon corps n’était plus qu’une machine et ma vie une suite d’entraînements. J’évoluais rapidement a travers les échelons, jusqu'à atteindre un point de non retour.
J’avais a peine 17 ans, lorsque l’on m’approcha pour entrer dans les ligues majeurs. J’avais connu un bon début de saison, un excellent même. Si j’acceptais, je serais un plus pour leur équipe, un élément clé. Et pourtant, je n’aurais jamais cru que tout cela irais si loin. Encore jeune et naïf, animé par le sentiment que tous mes effort portaient enfin fruit, j’ai bien sur accepté. De toute façon qui aurait refusé une pareille offre?
C’est ainsi que deux ans s’écoulèrent. Incapable d’être a la fois un joueur parmi l’élite ainsi qu’un étudiant, j’abandonnai l’école alors que j’en étais pourtant a ma dernière année, pour me concentrer exclusivement au hockey. A cette période de ma vie, le sport était la seule et unique chose qui avait de l’importance.
Tout d’abord, je me fis remarquer pour être le nouveau venu, le jeunot qui n’avait pas sa place dans la LNH. C’est dans ses remarques que je puisais ma force, celle de les contredire, de prouver ma valeur. Au cour des matchs qui suivirent, je multipliai les passes et les buts -surtout les buts- et réussis a clouer le bec aux plus sceptiques.
C’est a partir de la que tout commença a tomber pièce par pièce, et c’est a cette époque que je rencontrai Kirsten. Si ma popularité était au sommet, mon état d’esprit lui était au plus bas. Je ne supportais tout simplement par cet absence d’intimité, cet achalandage dès que j’apparaissais ou que mon nom était mentionné quelque part. Si je jouais au hockey, c’était d’abord et avant tout par passion, le reste comptait peu. Mais petit a petit, les désagréments qui semblaient venir de pair avec le hockey augmentaient de volume a mes yeux. Je perdais l’envie de jouer ainsi que ma patience. La présence de Kirsten a mes cotés rendait sûrement plus facile a supporter, toutes ces choses qui m’affligeaient. Elle, elle aimait ce coté Jet-Set, parader devant les foules et avoir des places dans les meilleurs hôtels. En fait, avec le recul je crois qu’elle les aimaient plus qu’elle ne pouvait m’aimer; pire, ce qu’elle aimait de moi, c’était que je puisses lui apporter cette vie de palace. Mais en ce temps, j’étais naïf, comme je l’ai mentionné plus tôt, je n’ai rien su voir… J’étais aveugle, aveuglé par l’amour, par une confiance absolue. Elle était tout ce que je désirais. Rien d’autre n’avait autant d’importance, pas même le hockey. Le hockey n’avait encore sa place dans ma vie que parce que c’était son souhait. Elle voulait que je joue, encore et encore, inlassablement.
J’ai donc continué a enchaîner les parties, si je n’étais pas au meilleur de ma forme, j’étais néanmoins assez bon pour compter des buts, et c’était tout ce qui comptait aux yeux de tous. Les buts. La vie de rêve que je m’étais imaginée disparaissait en fumée. Je ne voulais pas de ça… Mais c’était la seule vie que je connaissais; c’était douze années passées pour y arriver. Et les séries qui arrivaient… J’allais les jouer, et prendre ma décision par la suite.
Encore aujourd’hui, je m’en souviens comme si c’était hier. Le dernier match a gagné pour remporter la coupe. Nous allions gagner. C’était une certitude. Nous allions gagner, et j’avais la rondelle. Plus qu’un lancer et tout serait terminé. Les secondes filaient au tableau de pointage. Quelques secondes seulement… La foule scandait mon nom. Ce fut d’ailleurs la dernière fois que je l’entendis. Elle était déchaînée.
La voie était libre, tout droit jusqu’au but. J’avais une avance de plusieurs coups de lame assurée… J’avais le temps, comme toujours. Tout en parcourant les derniers mètres, je levai les yeux pour la voir. C’était un jeu entre nous. Kirsten s’assoyait
toujours au premier rang, le plus près possible du but de l’équipe adverse, et moi, avant chaque point a marquer, je levais les yeux et croisais son regard, une façon de lui dédier ma victoire. Elle était la femme de ma vie, chaque but lui revenait. J’allais la demander en fiançailles, ce soir après notre triomphe. Je la voulais a moi, et a moi seul…
Cette fois, je ne rencontrai pas son regard, il était occupé ailleurs. Occupé a dévorer les yeux un autre homme…
J’avais du ralentir, parce que maintenant je les entendaient, tout près, dans mon dos. Pourtant, je ne bougeai pas. Du reste, je n’ai aucun souvenir. Je me suis éveillé, étendu sur un lit aux draps blancs et aux murs tout aussi immaculés. La chambre était vide. Je n’avais aucun souvenir de la manière dont j’étais arrivé la, et encore moins de l’endroit ou j’étais… Sinon que c’était un hôpital. Un plâtre recouvrait ma jambe droite. J’appris par la suite, qu’en ralentissant, j’avais permis a mes adversaires de me rattraper. Dans la cohue, j’avais été percuté et m’étais retrouvé sous une pile de joueurs en pleine poussée d’adrénaline. La chance m’avait sourit, la seule blessure que j’en récoltais, c’était cette fracture du tibia. Une vilaine fracture toutefois. D’après le médecin, impossible pour moi de retourner sur la glace, du moins a un niveau aussi élevé. Parfait. C’était l’échappatoire que j’attendais depuis si longtemps…
Aussitôt remis sur pied, je bouclai mes valises, prenant tout le monde au dépourvu. S’en suivit de longues disputes avec Kirsten. Jamais je ne parlai de ce que j’avais vu pourtant. Mon séjour a l’hôpital m’avait enfin ouvert les yeux. Les disputes avaient un sujet principal; le hockey. Je ne pouvais pas renoncer ainsi. Je devais continuer, me battre, après tout j’étais un joueur étoile. Indirectement, elle me confirmait ce que je savais déjà; elle était amoureuse de la gloire et de la prospérité, pas de moi. Pour ma plus grande honte, j’étais incapable de la quitter. Quand a elle, je la soupçonnait de ne pas s’éloigner, du moins tant qu’elle penserait que j’avais une chance de repartir a la conquête des patinoires. Et bien qu’il en soit ainsi.
Je mis fin a tout ce cinéma en déménageant. Loin de tout. J’allai jusqu'à changer de pays, optant cette fois pour les Etats-Unis. Préférant mettre toutes les chances de mon coté, je choisis une petite ville presque inconnue, isolée. La, personne ne risquait de me reconnaître, de toute façon comment pourraient-ils faire le lien entre le joueur-étoile a la retraite a 19ans, et le nouveau venu. Désireux de reprendre ma vie ou je l’avais arrêté, j’allai jusqu'à reprendre l’école. Voilà ou j’en suis. A l’approche de mes 20ans, toujours cloîtré dans les salles de cours… Et pourtant, je suis plus heureux que jamais.
Dernières images 
Jeu 18 Oct - 20:05
